Un étonnant palais de la Renaissance
sur les terres des Ducs de Bourgogne
Depuis juillet 1999, une équipe d’experts s’applique à établir un état des lieux exhaustif pour permettre que soit menée à bien une restauration exceptionnelle, à la mesure du caractère particulier du Palais d’Ancy le Franc.
Trois soupers royaux à Ancy le Franc suffiraient à indiquer la gloire de ce château Renaissance, voisin d’Auxerre : en 1591, celui d’Henri IV, en 1631, celui de Louis XIII, et en 1674, le dîner de Louis XIV. Où dînent les rois, l’histoire tisse sa trame.
Mais revenons en arrière, au début des années 1540. Sebastiano Serlio (Bologne 1480 — Fontainebleau vers 1554), auteur de l’un des traités d’architecture les plus diffusés de notre temps, arrive à Fontainebleau, engagé par François 1er en tant que “paintre et architecteur du roi”. Formé à l’école des grands architectes de la Renaissance, Bramante, Paladio, son talent paraît bien en avance pour son temps.
“Bien qu’aucun bâtiment n’ait été réalisé ni même, pour autant qu’on sache, commandé à Serlio par le roi, la position de l’architecte à Fontainebleau était assez prestigieuse pour lui avoir valu de trouver d’autres commanditaires. Antoine de Clermont-Tallard fut le premier gentilhomme français à confier à un architecte italien non seulement le projet mais la construction de sa résidence au nord de la Bourgogne. Le château d’Ancy le Franc devait rester le plus important des bâtiments dus à Serlio : il y mélange de façon très originale des traditions française et italienne.
La symétrie des volumes et l’harmonie des façades à l’extérieur comme dans la cour, l’emploi des ordres, les escaliers, la distribution et la décoration du dedans, tout témoigne du génie de Serlio.
En France, le premier château quadrangulaire avec cour d’honneur cantonnée de pavillons fut celui d’Écouen, commencé en 1538. Son propriétaire, le Connétable de Montmorency, était l’un des hommes les plus puissants de France, jusqu’à sa disgrâce en 1541. Sa demeure ne se distinguait pas seulement par ses qualités formelles : elle inaugurait un nouveau type de château. Serlio toutefois renonçait au principe français de hiérarchie des corps de logis : au contraire il confère une égale importance aux quatre ailes, comme dans les palais de la Renaissance à Florence et à Rome.” [Sabine Frommel, Sebastiano Serlio, Architecte de la Renaissance, Gallimard].
Antoine III de Clermont, le constructeur, fût un personnage considérable dans le royaume. Nanti de fonctions importantes (lieutenant-général en Dauphiné, grand maître des eaux et forêts), comblé d’honneurs, son mariage avec la sœur de la duchesse de Valentinois lui a ouvert un large crédit à la cour. Quelle rivalité le bel Ancy n’a-t-il pas alimentée entre Antoine de Clermont et sa belle-sœur, Diane de Poitiers, alors toute occupée par la construction du château d’Anet par l’architecte français Philibert Delorme ? Nul ne le sait.
Le château d’Ancy offre encore aujourd’hui aux visiteurs un ensemble de peintures murales Renaissance d’une qualité exceptionnelle. La décoration de nombreux salons, chambres et galeries a été confiée aux principaux artistes du XVIe siècle venus tout exprès d’Italie pour décorer les palais de Fontainebleau et de Chambord à la demande des rois de France.
La Chambre des Arts (Le Primatice), la Galerie de Pharsale (Nicollo dell’ Abbate), la Chambre de Judith (Cornelis von Harlem), la chapelle (André Meynassier, artiste bourguignon) sont des joyaux.
Six générations de Clermont-Tonnerre se succèdent à Ancy le Franc, jusqu’à ce que Louvois, célèbre ministre de la guerre de Louis XIV le rachète en 1684. Il demande alors à Le Nôtre d’entourer le château d’un jardin à la française.
Gaspard-Louis-Aimé de Clermont-Tonnerre, descendant d’Antoine III de Clermont, le rachète en 1844. Il restera dans la famille jusqu’en 1981.
Il appartient aujourd’hui à la société Paris Investir SAS.
Le parc
Situé aux abords de l’Armançon et du Canal de Bourgogne, le château est bâti au cœur d’un vaste parc de 50 ha. De magnifiques parterres, jardins à l’anglaise et à la française, petits chemins, pyramide, nombreux cours d’eau et un vaste étang doté d’un îlot avec une folie du XVIIIe siècle offrent un charme délicat à cet espace foisonnant de verdure et de vestiges du temps passé…
Le jardin à la Française :
En 1684 lorsque le Marquis de Louvois acquit le château, il entreprit de lui donner le caractère d’une demeure “Grand Siècle”. Il ordonna la démolition des vestiges du mur médiéval, au nord-ouest du château, de façon à libérer l’espace pour de vastes communs disposés autour de deux cours.
Pour égaler les grands édifices de l’époque, Louvois commanda à Le Nôtre d’entourer le château d’un vaste jardin à la française ouvert sur le paysage. Avec ses magnifiques parterres, ses pelouses, ses fontaines et ses statues, Louvois tentait de faire d’Ancy le Franc son Versailles particulier.
Le jardin à l’Anglaise :
En 1759 le descendant du Marquis de Louvois, le Marquis de Courtanvaux, transforma les jardins en un parc à l’anglaise. Il fit creuser un lac artificiel au sud du bâtiment, avec un îlot très romantique sur lequel il fit édifier un pavillon, fabrique octogonale destinée à abriter ses idylliques loisirs.
Ce pavillon, nommé “la folie”, est un élégant témoignage de cette période.
Il était l’endroit préféré des propriétaires au XVIIIe, d’où on aimait tirer les feux d’artifices.